L’originalité ne se recherche pas

S’il est bien un mot qui revient souvent quand on parle de création et qu’on retrouve dans quantité non négligeable d’avis et critiques, il s’agit d’originalité. Autant une injonction commerciale qu’un critère de jugement à la réception, cette notion semble obséder un certains nombre de gens. Si l’originalité et l’innovation sont sans doute bénéfiques voire nécessaires dans un certain nombre de domaines, je m’étonne souvent de l’importance qu’on leur donne en arts, comme si elles constituaient des impératifs incontournables.

Trop mettre l’accent sur l’innovation, c’est oublier qu’une œuvre n’a pas besoin d’idées inédites pour être enrichissante, intéressante ou même simplement divertissante. C’est oublier que la nouveauté est relative à son point de vue et ses expériences passées. C’est oublier que l’originalité ne se loge pas uniquement dans les idées ou le style, mais aussi dans l’approche, l’intentionnalité ou encore les émotions suscitées.

Que tous les créateurs se rassurent : l’originalité ne se recherche pas parce qu’elle n’est pas vraiment un enjeu. Toute œuvre, dès lorsqu’elle provient de l’effort d’une ou plusieurs personnes, porte une voix propre, nourrie par leurs visions, convictions et personnalités. Juger de l’originalité d’une œuvre, c’est lui refuser ce statut pourtant acquis de base et c’est, parfois, passer à côté de ce qu’elle cherche à raconter. Toute démarche de création est valide, qu’elle produise un film révolutionnaire ou une réécriture peu innovante d’un mythe bien connu. L’art cherche avant tout à transmettre une expérience au lecteur, spectateur, auditeur… Certains sont touchés par l’innovation et apprécieront des idées nouvelles, en rupture avec ce qui existe déjà, d’autres passeront un temps tout aussi satisfaisant à se gorger de vu et revu.

Au fond, il serait sans doute bénéfique d’arrêter de focaliser autant sur l’originalité, d’un côté comme de l’autre. À trop vouloir la voir partout, on manque d’écouter et de la reconnaître. À trop vouloir la mettre partout, on échoue à être sincère et à se faire confiance. Laissons l’originalité de côté et concentrons nous plus sereinement sur le travail de création. Contentons-nous de faire ce qu’on a envie de faire, de la façon dont on a envie de le faire, et ce qui doit être suivra.

Rien ne sera jamais plus original qu’une œuvre tout simplement pleine de tripes.

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